CHAPITRE VII

L’Homme Sauvage

En ce temps-là, il y avait un empereur très puissant dans un des pays de l’est du monde. Chacun l’honorait et le servait de son mieux parce qu’il était d’une grande bonté envers les plus faibles et cherchait à établir la justice autour de lui. Et il avait une femme d’une haute naissance et d’une telle beauté que tous les poètes du pays, qui en étaient secrètement amoureux, la couvraient d’éloges et la magnifiaient de telle sorte qu’elle se croyait au rang des plus célèbres déesses d’autrefois. Cependant, sa beauté n’était que l’apparence qu’elle se donnait car, en réalité, c’était la femme la plus hypocrite et la plus luxurieuse qu’on eût vue sur cette terre. Comme elle était très surveillée par les gens de la cour, et que son époux se méfiait d’elle, elle avait recours à des ruses qui trompaient tout le monde. Elle ne pouvait en effet se passer du commerce avec les jeunes gens dont elle aimait la vigueur et l’impétuosité, et elle avait fait en sorte de garder auprès d’elle douze adolescents, sains de corps et d’esprit, qu’elle attifait en demoiselles et dont elle avait fait sa compagnie favorite. Elle possédait un tel talent de grimage et une telle persuasion que personne ne se doutait que ces charmantes jeunes filles qui ne la quittaient jamais étaient en réalité de solides garçons doués d’un grand appétit pour le corps féminin.

Elle avait cependant très peur que la barbe ne leur poussât, et elle leur oignait le menton de chaux et d’un onguent qu’elle faisait composer par des sorcières de sa connaissance. Ainsi leur barbe naissante tombait-elle, et ces jeunes gens passaient aisément pour des jeunes filles rieuses et enjouées, prêtes à satisfaire les moindres caprices de leur maîtresse. Ils portaient de longues robes traînantes qui dissimulaient leur virilité, ainsi que des voiles qui masquaient les traits marqués de leurs visages, et leurs cheveux étaient soigneusement arrangés à la manière des femmes, de façon que personne ne pût un seul instant soupçonner la vérité. Et l’impératrice menait ainsi joyeuse vie sans craindre aucunement d’être accusée de tromper son époux. D’ailleurs, celui-ci ne tarissait pas d’éloges non seulement sur la beauté de sa femme, mais encore sur le goût très sûr qu’elle avait de s’entourer de demoiselles d’une grande honorabilité et d’une très grande élégance.

Or, à cette époque arriva à la cour de l’empereur une jeune fille qui avait fui son pays d’origine par suite des dissensions qu’elle avait eues avec son père, un grand seigneur, mais elle se présenta sous un habit masculin et prit du service dans les meilleures maisons en qualité d’écuyer. Comme elle était droite, grande et dotée d’une élégante musculature, chacun la prenait pour un homme. De plus, ayant accompli de nombreuses prouesses, tant à la guerre que dans les tournois, elle fut bientôt armée chevalier par l’empereur lui-même, en même temps que plusieurs jeunes gens de son âge. Elle se nommait Avenable, mais se faisait appeler Grisandole, et tout le monde la prenait pour un homme. Cela ne facilitait guère sa vie de tous les jours, car toutes les dames et les jeunes filles de la cour étaient plus ou moins amoureuses de ce jeune garçon dont la mine était si avenante et l’habileté au maniement des armes si surprenante. Mais elle se trouvait fort bien à l’aise dans son rôle et ne pensait aucunement à en changer.

Mais une nuit que l’empereur dormait tranquillement auprès de son épouse, il eut un rêve étrange qui le poursuivit tout au long de la journée. Il avait vu, en effet, une grande truie dont les soies traînaient jusqu’à terre et qui portait un cercle d’or sur la tête ; il lui semblait que son apparence avait quelque chose de familier, sans qu’il eût pu pour autant lui donner un nom. Et, chose très étrange, dans son rêve il avait vu entrer douze louveteaux qui s’étaient précipités sur la truie et l’avaient saillie l’un après l’autre. Après quoi, la truie était partie avec les louveteaux. L’empereur rêva encore qu’il demandait conseil sur le sort qu’on devait réserver à cette truie, et on lui répondait qu’elle devait être jetée au feu avec les douze louveteaux.

L’empereur se réveilla très mal à l’aise, mais il ne savait pas pourquoi. Il n’en dit mot à sa femme, car il était sage et avisé et ne voulait en aucun cas se confier inconsidérément. En allant au conseil, il rencontra le jeune Grisandole dont il avait fait son sénéchal à cause de ses grandes qualités, et il pensa un instant lui demander ce qu’il pensait de son rêve. Mais la beauté du soi-disant jeune homme était telle qu’il en perdait tout contrôle sur lui-même. Aussi préféra-t-il se taire ; mais il demeura si pensif et si éloigné du reste du monde que ses familiers finirent par s’apercevoir de son trouble. Cependant, personne n’osa lui poser de questions et il demeura ainsi toute la journée, sans manger, sans boire, et répondant de façon très évasive aux questions que ses conseillers lui posaient.

Or, vers le soir, dans la forteresse où résidait l’empereur, on entendit une grande rumeur. Il s’agissait d’un cerf, d’une hauteur merveilleuse, et à trois cors, qui se faisait chasser dans les rues de la ville. Personne ne savait d’où il venait, mais il impressionnait tellement les gens que ceux-ci le poursuivaient en espérant bien mettre la main sur lui, et tout cela en poussant de grands cris et de grandes huées. Le cerf, après avoir parcouru longtemps les rues, se retrouva à la porte du palais où résidait l’empereur. Sans s’occuper des gardes, il franchit la porte et se précipita à l’intérieur, jusqu’à la salle où l’empereur était assis pour le repas, renversant les tables, les vins, les viandes, les pots et toute la vaisselle. Et quand il fut arrivé devant l’empereur, il s’inclina et se mit à parler dans le langage clair des humains au milieu des convives assemblés. Et voici ce qu’il dit : « Empereur, laisse tes pensées qui ne te valent rien de bon, car je t’avertis que tu ne trouveras personne pour t’expliquer le rêve que tu as fait cette nuit, hormis l’Homme Sauvage que tu devras t’efforcer de découvrir. » Et, là-dessus, les portes, qui pourtant avaient été solidement fermées, s’ouvrirent brutalement, sans que personne n’intervînt, et le cerf s’enfuit à travers les rues où il fut de nouveau chassé par les habitants. Mais il leur échappa très rapidement et, sans qu’on pût savoir comment, il sauta par-dessus les remparts et disparut dans la campagne. L’empereur fut bien ébahi de ce qui était arrivé, et il se demandait bien quelle était la signification du message que le cerf lui avait adressé. Il fut également très courroucé quand il apprit que le cerf s’était échappé de la ville et qu’il s’était enfui sans qu’on ne retrouvât trace de lui aux alentours. Il fit crier par toutes les rues que celui qui lui ramènerait le cerf, ou l’Homme Sauvage dont celui-ci avait parlé, recevrait la moitié de sa terre et la main de sa fille, à condition toutefois qu’il fût de bonne naissance et qu’il eût prouvé son habileté à tenir le gouvernement d’une province. Aussitôt, les jeunes gens du pays se mirent en quête du cerf et de l’Homme Sauvage, mais ils avaient beau errer dans les forêts, sur les pâturages et dans les champs cultivés, ils ne virent aucune trace de ceux qu’ils cherchaient, ni aucune indication sur l’endroit où ils pouvaient se trouver. La plupart d’entre eux ne tardèrent pas à revenir à la cour, affirmant haut et clair que l’empereur et eux-mêmes avaient été le jouet d’une illusion diabolique. Seule celle qui se faisait appeler Grisandole poursuivit sa chasse à travers les bois. Huit jours durant, elle erra de hallier en hallier sans rien découvrir. Alors, elle s’allongea pour se reposer au bord d’une fontaine à laquelle elle avait pu étancher sa soif, et elle allait s’endormir quand elle entendit un bruit de galopade dans la forêt et vit peu après surgir un grand cerf roux qui s’arrêta devant elle.

Et le cerf lui parla ainsi : « Grisandole, c’est la folie que tu chasses ainsi le long des jours et des nuits ! C’est en pure perte que tu me poursuis sans savoir qui je suis. Mais je vais t’aider. Je te dirai que tu n’obtiendras jamais ce que tu cherches si tu n’apportes en cet endroit de la viande de porc bien cuite, de la purée au poivre, du lait, du miel et du pain chaud. Mais ce n’est pas tout : amène avec toi quatre compagnons et un garçon qui fera cuire la viande à petit feu. Puis, tu dresseras le repas sur une table et, avec tes compagnons, vous vous cacherez. Alors, si vous avez de la chance, vous verrez peut-être l’Homme Sauvage. » Et, après avoir prononcé ces paroles, le cerf bondit et disparut dans la forêt. Grisandole ne mit pas une seule seconde en doute ce qu’elle venait d’entendre. Malgré sa fatigue, elle sauta sur son cheval et s’en alla chercher ce qu’on lui avait dit. Étant revenue avec ses compagnons et le garçon de cuisine, elle arrangea tout avec grande attention. La viande grilla sous un beau chêne, et le fumet qui se répandait dans toute la forêt attira l’Homme Sauvage. Mais dès qu’ils le virent, Grisandole et ses compagnons faillirent en perdre le sens tant le spectacle était étrange.

En effet, l’Homme Sauvage avait la tête grosse comme celle d’un veau, les yeux ronds et saillants, la bouche fendue jusqu’aux oreilles, des lèvres épaisses toujours entrouvertes, qui laissaient passer ses dents. Il avait les pieds retournés et les mains à l’envers, les cheveux noirs et durs, si longs qu’ils tombaient jusqu’à sa ceinture. Il était grand, courbé, velu et vieux à merveille, vêtu d’une peau de loup[62]. Ses oreilles, larges comme des vans, pendaient jusqu’au milieu de ses jambes, et il aurait pu s’en envelopper comme d’un manteau pour éviter de recevoir la pluie, un jour d’orage. Bref, il était si laid à regarder qu’on en arrivait à douter que ce fût un être humain. De plus, il avançait en frappant les arbres à grands coups d’une massue qu’il tenait comme un jouet dans sa main, et il menait avec lui, comme un berger son troupeau, une troupe de cerfs, de biches, de daims et d’autres bêtes de couleur rousse[63].

Ainsi donc, l’Homme Sauvage, attiré par le fumet de la viande rôtie, s’arrêta devant le feu et commença à se réchauffer en regardant la nourriture avec envie et en bâillant comme s’il n’avait pas mangé depuis très longtemps. Quand il vit que la viande était cuite à point, selon son goût, il l’arracha de la broche et la dévora sans reprendre sa respiration. Puis il mangea tranquillement le pain chaud et le miel, et but le lait, avant de s’endormir, le ventre plein, devant le feu qui continuait de brûler. C’est alors que Grisandole et ses compagnons sortirent de leur cachette. Avec beaucoup de précautions, et dans le plus grand silence, ils se saisirent de la massue de l’Homme Sauvage et emprisonnèrent solidement celui-ci grâce à une grosse chaîne de fer. Enfin, ils l’attachèrent sur le dos d’un cheval et prirent le chemin de la cour.

Or, quand ils eurent parcouru quelques lieues, l’Homme Sauvage sembla se réveiller. Il jeta des regards terribles autour de lui, mais ses yeux s’arrêtèrent sur Grisandole. Alors, il se mit à rire. Grisandole lui demanda pourquoi il riait. « Créature dénaturée, forme muée et méconnaissable, trompeuse en toutes choses, piquante comme un taon venimeux, empoisonneuse comme du venin de serpent, tais-toi, car je ne te dirai rien avant que nous soyons en présence de l’empereur ! »

Un peu plus loin se dressaient les bâtiments d’une abbaye nouvellement construite dans une clairière de la forêt, et au bord du chemin se tenait une foule de gens qui demandaient l’aumône. Lorsqu’il les vit, l’Homme Sauvage se mit à rire. Mais quand Grisandole lui demanda, encore une fois, pourquoi il riait, il lui cria méchamment : « Image fausse, décevante créature, piquante comme un poinçon, par lequel les hommes sont affolés ou tués, rasoir plus affilé et tranchant que le plus coupant des poignards, fontaine bouillonnante que rien ne peut épuiser, tais-toi ! Je ne dirai rien jusqu’au moment où nous serons devant l’empereur ! »

Ils arrivèrent à la cour de l’empereur. Quand il les reçut, il se préoccupa immédiatement des moyens qu’on avait mis en œuvre pour garder le plus sûrement possible son prisonnier. Mais l’Homme Sauvage lui dit : « Il est inutile de m’enchaîner, car je jure que je ne m’en irai pas avant d’avoir révélé toute la vérité sur le songe que tu as eu. Fais-moi délivrer de ces chaînes et convoque tous les membres de ton conseil. C’est devant eux que je dois tout t’expliquer. » L’empereur fit débarrasser l’Homme Sauvage de ses chaînes. Et une fois les conseillers assemblés, il le fit asseoir à son côté. Mais celui-ci fit savoir qu’il ne révélerait rien sans la présence de l’impératrice et de ses douze suivantes. L’empereur les convoqua et elles vinrent immédiatement. Quand il les vit arriver, l’Homme Sauvage se mit à rire, puis, se tournant vers Grisandole, il recommença à rire de plus belle, comme si rien ne pouvait arrêter son hilarité. À la fin, l’empereur lui demanda s’il n’était pas fou. « Seigneur, répondit l’Homme Sauvage, jure-moi d’abord devant tous ceux qui sont ici qu’il ne me sera fait aucun mal quoi que je puisse dire, et que je serai libre de tous mes mouvements dès que j’aurai parlé, et je promets de tout te révéler. » L’empereur jura solennellement, et ajouta : « Qu’il en soit ainsi, comme tu le désires. Maintenant, dévoile-moi la signification de mon rêve. »

« Ce n’est pas difficile, dit l’Homme Sauvage. La truie que tu as vue, c’est ta femme. Quant aux douze louveteaux, ce sont ses douze suivantes. Mais, si tu m’en crois, fais-les se dévêtir devant tout le monde : on verra bien si elles sont bâties pour la servir avec dévotion ! » L’empereur ébahi ordonna qu’on déshabillât les suivantes, et chacun put se rendre compte qu’il s’agissait de douze jeunes gens à qui rien ne manquait. L’empereur fut si irrité en voyant cela qu’il demeura un long moment à méditer. Puis, il se tourna vers ses conseillers et leur demanda quelle justice il fallait mettre en œuvre. Ils délibérèrent un instant entre eux et jugèrent que la femme devait être brûlée pour adultère et paillardise, et les jeunes débauchés pendus pour crime de lèse-majesté. Et le jugement fut exécuté sur-le-champ.

Cependant, l’empereur, très étonné par la science de l’Homme Sauvage autant que par son rude aspect, lui demanda : « Peux-tu me dire pourquoi tu as ri en regardant mon sénéchal, quand tu as passé devant l’abbaye, ce matin, et quand la reine est entrée ici ? » L’Homme Sauvage répondit : « Seigneur, j’ai ri la première fois parce que c’était une femme qui m’avait pris par sa puissance et son adresse, alors que nul homme n’y avait réussi jusqu’à présent : car ce chevalier, seigneur empereur, est la plus belle et la meilleure femme qui se puisse trouver dans tout ton pays. La seconde fois, j’ai ri devant l’abbaye parce qu’un trésor était enfoui sous les pieds de ceux qui demandaient l’aumône. La troisième fois, j’ai ri par dépit : car l’impératrice avait le meilleur homme de tout le pays, mais se donnait à douze ribauds. N’en tiens tout de même pas rigueur aux autres femmes, car c’est une chose commune aux femmes qui ont un bon mari de penser qu’elles en ont le pire. Voilà pourquoi j’ai ri. À présent, seigneur empereur, que je t’ai révélé ce que tu voulais savoir, permets que je me retire. »

« Je voudrais encore te demander une chose, dit l’empereur. Comment vais-je tenir mon serment puisque j’ai promis ma fille en mariage à qui s’emparerait de toi et que ce chevalier est une femme ? » L’Homme Sauvage se mit à rire : « Ce n’est pas difficile, épouse-la. Tu n’auras jamais femme plus belle et plus sage. » Et sur ces mots, l’Homme Sauvage prit congé sans que personne ne s’aperçût de son départ. Mais, sur le haut de la porte du palais, apparut cette inscription en caractères hébreux : « Que tous ceux qui liront ces lettres sachent que le grand cerf branchu qui fut chassé dans la ville et l’Homme Sauvage amené par une jeune fille qu’on croyait un homme n’étaient autre que Merlin, le premier conseiller du roi de Bretagne[64]. »

Cependant, Uther Pendragon s’inquiétait de n’avoir pas de nouvelles de Merlin. Il l’avait fait chercher à travers la forêt de Kelyddon, sans aucun succès. Personne n’avait vu Merlin depuis de longs mois, et Uther, qui se trouvait confronté à de nombreuses révoltes de la part de certains de ses vassaux, aurait eu bien besoin des conseils du devin. Mais les hommes de confiance qu’il avait envoyés un peu partout revenaient l’un après l’autre sans pouvoir révéler autre chose que le récit de leurs aventures. Un jour, l’un d’eux, qui avait nom Kynon, fils de Klydno, raconta pourtant une étrange histoire devant le roi et ses principaux conseillers. Voici ce que Kynon narra à ses compagnons :

« Quand je suis parti à la recherche de Merlin, et après avoir fait mes préparatifs, j’ai voulu aller plus loin que les limites de ce pays. J’ai donc traversé la mer et j’ai abordé dans cette région qu’on appelle encore parfois l’Armorique, mais qui est la Petite-Bretagne. J’errai dans une grande forêt qui recouvre presque toute la péninsule, une forêt dense et touffue, riche en gibiers de toutes sortes, avec des vallées bien arrosées et des collines où soufflent abondamment les vents venus des quatre coins de l’horizon. Je traversai des landes et des déserts, je me plongeai dans la profondeur des bois, mais je ne rencontrai que des forestiers ou des pasteurs qui menaient leurs troupeaux. Il n’y avait ni village ni forteresse, mais des cabanes isolées où vivaient de pauvres gens qui avaient beaucoup de mal à trouver leur nourriture. Je me croyais vraiment aux extrémités du monde.

À la fin, je m’engageai dans un vallon, le plus beau du monde, couvert d’arbres très verts et de taille bien égale, et qui était traversé dans toute sa longueur par une rivière aux eaux rapides et bruyantes. Un chemin longeait la rivière. Je le suivis tranquillement jusqu’au milieu du jour et, passant de l’autre côté de l’eau, je poursuivis ma route jusqu’à la neuvième heure. Je me trouvai alors dans une vaste plaine, à l’extrémité de laquelle se dressait une forteresse étincelante, dont la base était baignée par les flots. C’est vers elle que je me dirigeai. Lorsque je parvins à la porte, deux jeunes gens aux cheveux blonds frisés se présentèrent à ma vue. Ils portaient chacun un diadème d’or et leur vêtement, très ample, était d’une remarquable étoffe brodée d’or. Ils portaient des arcs d’ivoire dont les cordes étaient des nerfs de cerf. Leurs flèches dont les hampes étaient en os de baleine avaient des bardes de plumes de paon. La tête des hampes était en or. La lame de leurs couteaux était également en or et le manche en os de baleine. Ils étaient en train de s’exercer à lancer leurs couteaux sur le tronc d’un gros arbre qui se trouvait devant l’entrée de la forteresse.

À peu de distance de ces jeunes gens, j’aperçus un homme aux cheveux blonds frisés, dans toute sa force, la barbe fraîchement rasée, l’air noble et fier. Il était vêtu d’une longue robe et d’un manteau d’étoffe brodée d’or. Il avait aux pieds des souliers élégants faits du cuir de la meilleure qualité, fermés chacun par un bouton d’or. Dès que je l’aperçus, je m’approchai de lui dans l’intention de le saluer, mais c’était un homme d’une telle courtoisie que ce fut lui qui se leva pour me saluer. Et il m’invita aimablement à le suivre dans la forteresse.

À l’intérieur, je vis qu’il n’y avait d’autres habitants que ceux qui se trouvaient dans la grande salle. Là se tenaient vingt-quatre jeunes filles en train de coudre de la soie auprès de la fenêtre, et je ne crois pas me tromper en disant que la plus laide d’entre elles était la plus belle de toutes les jeunes filles que j’ai pu voir jusqu’à présent dans toute l’île de Bretagne. À mon arrivée, elles se levèrent et me saluèrent. Six d’entre elles prirent mon cheval et se chargèrent de mes armes pour aller les laver dans un bassin dont la blancheur était éclatante. Un autre groupe mit des nappes sur les tables, et six autres me débarrassèrent de mes vêtements de voyage, m’en donnant d’autres, confortables et richement ornés. On étendit sur le sol de nombreux coussins recouverts de fine toile rouge, et tout le monde s’assit. On apporta alors des aiguières d’argent pour nous laver et des serviettes de fine toile, les unes vertes, les autres blanches.

Lorsque nous fûmes lavés, l’homme aux cheveux blonds frisés qui m’avait accueilli se mit à table à côté de moi, et toutes les jeunes filles se groupèrent de l’autre côté, à l’exception de celles qui assuraient le service. La table était d’argent, et les linges de table de la toile la plus fine qu’on eut jamais vue. Quant aux vases dont on nous servait la boisson, il n’y en avait pas un qui ne fût en or, en argent ou en corne de bœuf sauvage. On nous apporta notre nourriture. Je crois bien que je n’ai jamais mangé meilleurs mets que ce soir-là, ni mieux préparés, et que je n’ai bu de breuvage plus suave et plus parfumé.

Nous arrivâmes à la moitié du repas sans que l’homme ou les jeunes filles n’eussent dit un seul mot. Je commençais à penser qu’ils étaient muets, ou bien qu’un enchantement leur interdisait de parler. Mais lorsqu’il sembla à mon hôte que je commençais à être rassasié, il me demanda qui j’étais et quel était le but de mon voyage. Je lui répondis bien volontiers, et j’ajoutai que j’étais fort heureux de trouver quelqu’un avec qui parler, car, à mon avis, le seul défaut que je remarquais dans sa cour, c’était qu’ils fussent tous aussi mauvais parleurs. Il se mit à sourire et dit : « Seigneur, nous aurions parlé volontiers avec toi depuis longtemps sans la crainte que nous avions de te troubler dans ton repas, mais nous allons le faire maintenant. » Je lui révélai donc qui j’étais et ce que je venais chercher dans ces régions. J’ajoutai aussi que je ne craignais pas d’affronter les dangers quels qu’ils fussent pour parvenir au but que je m’étais fixé, même si ces dangers étaient d’ordre surnaturel, car je savais que Dieu me protégerait des entreprises de l’Ennemi. Mon hôte me regarda et se remit à sourire : « Si je ne croyais, dit-il, qu’il dût t’en coûter beaucoup de mal, je t’indiquerais bien un chemin qui mène sûrement vers ce que tu cherches. Mais j’ai trop d’estime envers toi pour te le confier. » Je fus fort chagriné par ces paroles, et mon hôte ne fut pas long à s’en apercevoir. Il me dit : « Je vois ta déception sur ton visage. Puisque tu aimes mieux que je t’indique une chose désavantageuse pour toi plutôt qu’avantageuse, je me résoudrai à le faire. Couche ici cette nuit. Lève-toi demain matin de très bonne heure et poursuis le chemin par lequel tu es arrivé dans cette vallée. Tu parviendras à un bois très touffu et, avant ce bois, tu remarqueras un chemin bifurquant à droite. Suis-le jusqu’à une grande clairière unie, au milieu de laquelle se trouve un tertre. Il est probable que tu puisses trouver là ce que tu cherches avec autant d’acharnement. » Je remerciai mon hôte chaleureusement et, quand le repas fut terminé, on me conduisit à une chambre confortable en me souhaitant un agréable sommeil.

Mais la nuit me parut fort longue tant j’étais impatient de poursuivre mon chemin. Aux premières lueurs de l’aube, je me levai et m’habillai. Tous les gens de la forteresse étaient déjà debout et m’accompagnèrent dans la cour. Je remarquai alors qu’au milieu de cette cour, je ne l’avais pas vu la veille au soir, il y avait un disque qui paraissait tout en cuivre, pendu à l’une des branches du gros arbre contre lequel s’étaient exercés les jeunes gens en y lançant leurs couteaux. Mon hôte se dirigea vers l’arbre et, à l’aide d’un petit marteau de bronze, frappa trois fois le disque de cuivre. Le bruit se répercuta longuement dans la vallée. On m’amena mon cheval tout sellé, on me rendit mes armes et on me souhaita de trouver ce que je cherchais. Je leur répondis en les saluant et en les remerciant de leur accueil, et je me hâtai dans la direction que mon hôte m’avait indiquée. Je découvris le chemin qui bifurquait à droite, et j’y étais à peine engagé que je rencontrai, dans une vaste clairière nue, des taureaux sauvages, des ours, des léopards qui combattaient entre eux et faisaient un bruit si terrible que je m’arrêtai, prêt à m’enfuir si ces bêtes farouches se jetaient sur moi. Au milieu de la clairière s’élevait un tertre de pierres bleues, et sur ce tertre se tenait un homme étrange, le visage très sombre, laid et hideux plus qu’il n’est possible de l’imaginer. Il avait les cheveux touffus, les oreilles larges, le front dégarni, les sourcils abondants, des dents de sanglier, aiguës et jaunâtres, un menton proéminent, une barbe hirsute et de toutes les couleurs. Il tenait à la main une massue qui me parut être en fer tellement elle était massive et terrible, et tantôt il s’appuyait dessus, tantôt il la faisait tourner autour de son poignet monstrueux.

Je m’approchai de lui sans vouloir paraître impressionné et je le saluai aimablement. Il me répondit d’une façon bourrue, comme s’il était dérangé par mon intrusion. Mais j’étais fort intrigué. Je lui demandai qui il était et pourquoi il semblait garder les animaux sauvages qui se battaient dans la clairière. « Quel pouvoir as-tu donc sur ces animaux ? » lui dis-je. – « Je vais te le montrer, petit homme », me répondit-il. Il prit un bâton qui était posé près de lui et en déchargea un bon coup sur le dos d’un cerf. Celui-ci fit entendre un grand bramement et aussitôt, à sa voix, accoururent des animaux en aussi grand nombre qu’il y a d’étoiles dans le ciel, au point que j’eus peine à me tenir debout au milieu d’eux dans la clairière. Je remarquai d’ailleurs qu’il y avait également des serpents, des vipères et toutes sortes d’animaux rampants. L’Homme Sauvage jeta un regard flamboyant sur ces animaux et leur ordonna d’une voix terrible d’aller paître. Immédiatement, tous les animaux baissèrent la tête et lui témoignèrent le même respect que des hommes soumis à leur seigneur. « Vois-tu, petit homme, dit l’Homme Sauvage, le pouvoir que je possède sur ces animaux ? » Il fit encore un geste en élevant sa massue au-dessus de sa tête, et les animaux se dispersèrent sans bruit à travers les bois.

« Mais que cherches-tu ici ? me demanda brusquement l’Homme Sauvage. Ce n’est sûrement pas pour me voir garder mes bêtes que tu es venu jusqu’à ces régions du bout du monde ! » Je lui répondis : « Certes non. Je parcours cette terre à la recherche de Merlin, le plus sage et le plus habile de tous les hommes. » L’Homme Sauvage eut un rire grossier : « Ce n’est certainement pas ici que tu trouveras un jeune homme sage et habile. Je n’ai jamais entendu dire quoi que ce soit de celui que tu appelles Merlin, et parmi tous ceux que je connais, aucun ne serait capable de t’en parler. Mais je vais te donner un conseil : si tu suis ce chemin que tu vois à l’extrémité de la clairière et que tu marches dans la direction de cette colline rocheuse, là-bas, tu pourras jeter ton regard sur le pays environnant. Et si tu ne vois rien qui t’intéresse, va dans la vallée qui est au pied de cette colline. Au milieu, tu verras un grand arbre. L’extrémité de ses branches est plus verte que le plus vert des sapins. Et sous l’arbre est une fontaine dont l’eau bout, bien qu’elle soit plus froide que le marbre. Sur le dessus de la fontaine, tu verras une grande dalle de pierre, et sur la dalle un bassin d’argent qui y est attaché avec une chaîne d’argent de façon qu’on ne puisse les séparer[65]. Prends le bassin, remplis-le de l’eau de la fontaine et répands-la sur la dalle de pierre. Je ne t’en dis pas plus, mais si tu m’en croyais, tu n’irais pas plus loin et tu retournerais chez toi, car il ne peut rien t’arriver de bon dans cette aventure. »

Néanmoins, je pris congé de l’Homme Sauvage et j’allai dans la direction qu’il m’avait montrée. Je mis très longtemps à parvenir à la colline et, une fois sur le sommet, j’examinai le pays aux alentours. Mais je n’y vis rien d’autre que des arbres. Seule une vallée s’ouvrait dans le flanc de la colline, et je descendis de ce côté. On en était presque à la moitié du jour lorsque j’aperçus ce dont m’avait parlé l’Homme Sauvage : l’arbre et la fontaine. De l’arbre, je peux dire que c’était le plus beau et le plus verdoyant des pins que j’avais pu voir jusqu’alors. Je ne crois pas qu’il eût laissé passer une seule goutte de la plus forte pluie tant son feuillage était dru et vigoureux. Je vis aussi la dalle de pierre, et le bassin d’argent attaché à une chaîne d’argent. Et, au-dessous, il y avait la fontaine dont l’eau bouillonnait comme de l’eau chaude. Je savais pourtant qu’elle était plus froide que le marbre.

Alors, me souvenant des paroles de l’Homme Sauvage, et ne craignant pas les désagréments dont il semblait m’avoir averti, je pris le bassin, puisai de l’eau dans la fontaine et la répandis sur la dalle de pierre. J’étais curieux de voir ce qui allait se produire, et je dois dire que cela fut très inattendu.

C’était un très beau jour d’été. Le soleil brillait de toute sa splendeur et le ciel était plus pur et plus bleu que la plus bleue des mers. Mais à peine avais-je fini de répandre l’eau sur la dalle que le ciel se couvrit brusquement de nuages noirs et que le tonnerre se fit entendre. Et après le bruit, ce fut la pluie, une pluie de tempête, avec des rafales de vent comme je n’en avais jamais encore vues. Le temps devint si affreux et la foudre tombait avec tant de violence que je pensai cent fois être tué dans cette tourmente. En plus de la pluie, il y avait de la grêle, et pas un grêlon n’était arrêté par les branches, par la peau ou par la chair : cela pénétrait jusqu’aux os et j’en étais tout meurtri. Je ne trouvais aucun abri, même sous le pin que je croyais capable de protéger de toute pluie. Je m’étais replié sur moi-même de façon à en avoir le moins de mal possible, mais rien n’y faisait. À la fin, je compris que la tempête s’apaisait et je levai la tête : il n’y avait plus une feuille aux arbres, et tout paraissait désolé autour de la fontaine. Et, aussi vite que la tempête s’était déchaînée, elle se calma et le ciel redevint aussi pur et aussi bleu qu’il l’était quelques instants plus tôt. Les vents avaient cessé de souffler, et le soleil se remit à chauffer, ce qui n’était pas négligeable car j’étais tout trempé et je grelottais de froid.

Mais le prodige n’était pas terminé. Dès que la tempête eut cessé, je vis des multitudes d’oiseaux parcourir le ciel et se poser sur l’arbre qui dominait la fontaine. Ils étaient si nombreux sur cet arbre qu’on ne pouvait même plus en voir les branches, et l’arbre en paraissait d’autant plus beau. Quant aux oiseaux ainsi rassemblés, ils se mirent à chanter, et leur chant était si mélodieux que je ne pense pas avoir entendu quelque chose de plus mélodieux. Chacun des oiseaux suivait en effet sa propre partie, et l’ensemble était si parfait qu’on pouvait se demander si ce n’était pas une musique céleste. J’étais plongé dans le ravissement et je ne pouvais m’empêcher d’oublier le froid et l’humidité, ne pensant plus qu’à la douce lumière du soleil qui me redonnait vie, qui asséchait mes vêtements trempés et qui me lavait de toutes mes fatigues. Celui qui n’a pas entendu un tel chant ne saura jamais le bonheur qu’on peut ressentir à écouter les harmonies venues du ciel.

Au moment où je prenais le plus de plaisir à écouter les oiseaux, des plaintes et des cris montèrent le long de la vallée, à travers les arbres, et une voix qui paraissait surgir de nulle part parvint jusqu’à moi : « Homme imprudent, que me veux-tu ? Quel mal t’ai-je infligé pour que tu me fisses à moi et à mes sujets le tort que tu as provoqué ? Ne sais-tu pas que la tempête n’a laissé en vie, dans ces parages, ni créature humaine ni créature animale surprise au-dehors ? Même les feuilles des arbres ont été balayées par le vent et la pluie, et cette terre est devenue stérile par ta faute ! »

C’est alors que se présenta devant moi, sur un cheval tout noir, un cavalier long et maigre qui était revêtu d’un grand manteau également noir. En chevauchant, il faisait un tel bruit que j’eus l’impression qu’une nombreuse troupe l’accompagnait, mais je vis qu’il était seul et que c’était le choc de ses armes qui provoquait un tel vacarme dans la forêt. Il se présenta devant moi et me défia, la lance relevée. Je n’eus que le temps de sauter sur mon cheval et de répondre à sa provocation. Le choc fut rude, et j’eus beau tenter de me défendre, je fus bientôt culbuté. Le cavalier noir passa alors le fût de sa lance à travers les rênes de mon cheval et s’en alla, me laissant bien penaud et sans monture. Il ne me fit même pas l’honneur de m’emmener en tant que prisonnier. Il ne me dépouilla pas de mes armes non plus : il se contenta de m’abandonner dans cette forêt. »

Ainsi parla Kynon, fils de Klydno, l’un de ceux qu’Uther Pendragon avait envoyés dans tout le royaume pour tenter d’avoir des nouvelles de Merlin. Uther avait écouté avec attention le récit qu’avait fait Kynon. Il lui dit : « Je te remercie, ami, de ta loyauté. Non seulement tu as subi maintes mésaventures en obéissant fidèlement aux ordres que je t’avais donnés, mais tu nous les racontes avec une franchise qui t’honore et te rend digne de mon amitié. Mais puis-je te dire, Kynon, que tu es passé bien près de Merlin sans le voir ni le reconnaître ? Car enfin, il est évident que cet Homme Sauvage qui gardait les bêtes féroces dans la clairière n’était autre que celui que je t’avais envoyé chercher. Il ne voulait pas qu’on pût le reconnaître et il a modifié son aspect pour te mettre à l’épreuve. Il t’a même envoyé à la fontaine magique qui fait pleuvoir pour savoir si tu étais capable de dénouer les enchantements qu’il suscite dans la forêt. Merlin m’est souvent apparu comme un Homme Sauvage, fruste et grossier, mais c’est pour mieux tromper son monde et sonder les intentions de ceux qui viennent s’adresser à lui. »

Kynon, fils de Klydno, faisait piteuse mine, mais personne, dans l’assemblée, n’osait se moquer de lui, car chacun était persuadé, au fond de lui-même, que, placé dans les mêmes circonstances, il aurait agi de même et n’eût point reconnu Merlin dans ce gardien des bêtes sauvages. « Et qu’as-tu fait ensuite ? » demanda Uther Pendragon à Kynon. « Seigneur roi, répondit Kynon, je ne pouvais plus rien pour ton service. Privé de mon cheval que le cavalier noir avait emmené triomphalement, je repris le chemin en sens inverse, mais à pied cette fois. Je retrouvai le gardien des bêtes sauvages dans la clairière, mais je n’avais nulle envie de lui parler, car il m’aurait couvert de railleries. Ne m’avait-il pas prévenu qu’il ne m’arriverait rien de bon en allant jusqu’à la fontaine ? Je repris mon chemin vers la forteresse où j’avais passé la nuit. Mes hôtes se montrèrent encore plus aimables et courtois que la veille. On me fit faire bonne chère et je pus parler à mon gré avec les hommes et les jeunes filles. Mais personne ne me demanda ce qui s’était passé durant la journée, personne ne fit la moindre allusion à l’Homme Sauvage ou à la fontaine qui fait pleuvoir. D’ailleurs, je n’avais nulle envie d’en parler moi-même. Je passai la nuit dans la forteresse et, le lendemain matin, lorsque je descendis dans la cour, je m’aperçus que toute la forteresse était vide. Il n’y avait plus personne et tout paraissait désert et abandonné, comme si mes hôtes de la veille n’avaient jamais existé que dans un rêve. Par contre, je trouvai un cheval attaché au gros arbre de la cour, un palefroi brun foncé, à la crinière toute rouge, aussi rouge que la pourpre, et complètement équipé. C’est ainsi que j’ai pu revenir rapidement te rendre compte de ma mission, roi Uther. Tu pourras voir ce cheval, il se trouve actuellement dans ta propre écurie. »

Uther Pendragon réfléchit un instant, puis il dit à Kynon : « N’aie aucune amertume de ce qui t’est arrivé, Kynon, car j’en ai subi autant de la part de Merlin. Sache que tout ce que tu as vécu n’était qu’illusion, et que Merlin, qui sait parfaitement que j’ai besoin de lui, m’envoie cet avertissement pour me signifier que les temps ne sont pas encore venus pour qu’il vienne vers moi. »

Ainsi parla Uther Pendragon, roi de Bretagne. Et tous ceux qui l’entendirent comprirent que c’est sur eux que reposait le sort du royaume[66].